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Des mondes de musiques

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Ethnotest

Fais-nous danser, Joli Larousse !

Epistemologix

On l’a vu récemment : la recherche archéologique, ça consiste à recueillir sur des ossements anciens l’ADN des chercheurs d’aujourd’hui. Ce qui permet de lire le passé à la lumière du présent. A se re-présenter le passé, en quelque sorte.

Certains archéologues m’ont objecté naïvement qu’ils se lavaient toujours les mains avant de tripoter le moindre métacarpe et que leur chien n’avait nul accès à quelque cubitus que ce soit. J’en prends bonne note. Mais je leur suggère de lire plus.

Par exemple le Petit Larousse illustré de 2007. On nous y enseigne que fest noz est un “mot celte“, dont le pluriel est au choix “fest noz ou festou noz“ ; qu’il concerne la “région Bretagne“ ; qu’il est une “fête nocturne traditionnelle“ ; qu’on y “danse au rythme des chants et de la musique jouée par les sonneurs (de biniou, de bombarde)“ .

Le Petit Larousse est en un seul volume, ce qui oblige à, resserrer l’information. J’imagine que dans un Larousse plus joufflu on nous en dit plus : que fest noz ne relève pas du celte, mais du celtique ; qu’à ce titre il n’a pas deux pluriels, mais un seul ; que fest n’y a pas le sens du français fête ; qu’il ne concerne pas la seule “région Bretagne“, vu qu’il pullule dans le monde entier, de Berlin à Boston, en passant par Milan et Tokyo, tous lieux où il incarne une tradition celte bien vivante – alors qu’en Bretagne avant 1920 (terminus ad quem), il n’a jamais concerné que quelques communes de Haute Cornouaille ; et qu’il est réducteur de focaliser sur biniou et bombarde, passant sous silence la celtitude de l’accordéon, du piano, des percussions et de la sono. Ça fait passéiste.

On ne nous dit pas non plus ce qui s’y danse. Des danses celtes, de toute évidence. Donc le highland fling, du set dancing, de la bourrée arverne et du picoulet helvétique. Sans oublier que le cercle circassien est celte, au même titre que “la chapelloise“ ou Cochinchine. Mais bon, l’essentiel est dit : on a affaire là à une tradition celte bien vivante. Et si le Breton se montre moins tolérant que le Celte sur les pluriels, le sens des mots et la nature des choses qui se cachent derrière, il n’est plus là pour protester : il y a longtemps qu’il a été expulsé des réjouissances de Babaorum by night, lesquelles remontent exactement à 1955 (terminus a quo). Je n’ai pas eu le temps de dépouiller le Robert (qui comme son nom l’indique suppose au moins deux volumes), mais je ne le crois pas plus nutritif a priori.

Alors il me semble que le Petit Larousse devrait grandir un peu et étendre sa façon de voir à d’autres termes. On y lirait par exemple : “bal folk (pluriel bal folk ou bals folk), mot gallo-romain, région world. Fête nocturne où l’on danse au rythme de compos“. Ou encore : “briolage (pluriel briolage ou briolages), mot latin, région Europe. Chant traditionnel qui permet de faire le bœuf sur un podium derrière un micro“. Pour être sûr d’avoir compris, vous cherchez l’article “bœuf“. Et vous trouvez : “bœuf (pluriel bœuf ou bœufs), mot indoeuropéen, région Inde et Europe. Engin traditionnel à traction diurne, également appelé cheval“. Vous cherchez donc “cheval“ et vous lisez : “cheval (pluriel cheval ou chevaux), machine agricole dont la propulsion est assurée par un moteur diesel“. Il n’y aura plus qu’à ajouter pince fest, fest nausée, branle d’Osso, chants de bricolage, mazurka chamalo et endromaludaire, et vous aurez fait le tour de ce que le passé doit à l’ADN d’aujourd’hui.

Faire du vieux avec du neuf, ça permet de faire croire au père noël à des jeunes innocents. Et quand ces jeunes-là se mâchouilleront de la bouillie avec leurs gencives, c’est une solution biologique qui viendra résoudre les contrevérités du revivalisme. Le temps sera alors venu de refaire des dictionnaires.