DENEZ

En passeur de deux mondes, le visible avec celui des vivants et l'invisible avec celui des morts, Denez mêle habilement musiques actuelles et musiques traditionnelles, ancestrales. Avec cet album ouvert sur le monde, créateur d'images et de rêves, Denez s'affirme un peu plus, s'il en était encore besoin, comme l'une têtes d'affiches de la scène bretonne.

Comme sur chacun de ses disques, la langue bretonne est mise en avant. L'album débute d'ailleurs par En avel a-benn, dans le vente contraire, qui est une véritable ode au droit des peuples, au respect des langues, tout à fait dans le droit fil de la loi sur les langues régionales qui vient d'être adoptée par le parlement, un chant qui fait la part belle à la diversité culturelle que Denez défend depuis toujours. Quatorze chansons dans la même veine se succèdent durant plus d'une heure, tantôt revendicatives, tantôt plus mystérieuses, qui font la part belle à la poésie éternelle, au travers de mots d'aujourd'hui.

Du début à la fin, l'émotion est palpable, la transe jamais bien loin, grâce à la rencontre réussie des instruments à la fois traditionnels et électro. La voix unique et parfois vibrionnante de Denez en est bien entendu la colonne vertébrale. Au fil des plages nous découvrons des associations qui enrichissent la musique, tel le bandonéon argentin qui dégage une douce mélancolie sur C'wervoni - Amertume.

Denez a pour l'occasion invité plusieurs chanteurs comme Aziliz Manrow et le rappeur Oxmo Puccino sur une valse étourdissante Waltz of Life. Tout au long de ce superbe opus, les invités se succèdent ou s'entrecroisent. Citons Yann Tiersen (piano, accordéon, ondes Martenot) et Émilie Quinquis (chant), Ronan Le Bars (uilleann pipes, whistle), Youenn Kamm (trompette, bugle) et ses complices habituels que sont Jonathan Dour au violon et au violoncelle, Fred Guichen à l'accordéon diatonique, Cyrille Bonneau à la cornemuse, bombarde, saxo... ou Jean-Charles Guichen à la guitare... Sans oublier James Digger aux claviers et aux machines pour le côté électro.

Enfin soulignons la belle prestation de la Kevrenn Alre qui clôt le premier morceau. Absolument fantastique. De la première à la dernière note de l'album, la voix de Denez est empreinte d'émotion, d'une beauté poignante, à parfois couper le souffle. Si j'ajoute que Denez est l'auteur des magnifiques dessins qui illustrent la jaquette de ce très bel objet, on n'est pas loin d'affirmer qu'il est doté de tous les talents.

Une véritable réussite. Sûrement l'un des plus beaux albums bretons de l'année 2021.

Coop Breizh DB 10 CD 1172 - https://www.coop-breizh.fr