Tao Ravao & Vincent Bucher
Piment Bleu
Etienne Bours
On ne change pas une équipe qui gagne. Et ce duo est une sacrée équipe.
On a beau se dire qu’ils n’en sont pas à leur coup d’essai et qu’ils ont accumulé quelques bons disques au fil des ans, il n’empêche que chaque nouveauté est une surprise agréable. Et ce nouveau disque confirme avec une énergie qui fait chaud au coeur autant qu’au corps. L’intelligence de la formule vient du fait qu’à aucun moment on n’oublie totalement Madagascar et ses cordes alors que toutes les fenêtres sont ouvertes sur l’Amérique du blues et de ses expressions créoles. On tangue entre ces deux océans de musiques populaires qui disent en quelques souffles, en quelques rythmes et avec une grande simplicité de mots ce que blues, zydeco, chanson africaine, rhythm’n’blues ou gospel ont toujours su exprimer avec ce subtil mélange de gravité et d’élan.
Kabosy ou valiha semblent avoir été créés pour que l’harmonica vienne s’y coller dans une danse d’une sensualité irrésistible. Et la voix vient évidemment ajouter une dimension quasi griotique parce que, ici comme à l’ouest du continent africain, le chant se fait chronique, mémoire, regard sur le monde… On évoque Mandela, les grands bluesmen du delta du Mississippi, Thomas Sankara héros panafricaniste du Burkina, Adama Traoré jeune Africain mort de violences policières en 2016 dans le Val-d’Oise… ; on salue la lenteur, l’amour, l’unité, la beauté de la terre ou de la vie.
Tao Ravao et Vincent Bucher signent un disque tout-à-fait dans l’air du temps, pas l’air qui nous est insufflé de force mais celui que l’on respire en regardant le monde en face en essayant de garder un minimum d’espoir et de lucidité entre gens capables de faire et d’écouter cette musique.
